Une fois n'est pas coutume, l'édito du mois puise son inspiration dans le courrier de Pierre (qui m'accorde le droit de publier sans son patronyme complet), en réaction à l'édito d'avril dernier traitant de la hausse possible de MTOW des ULM à 500 kg.

Bonjour ULMaG,
C'est l'hypocrisie qui prédomine les conversations sur le poids des ULM. On s'entend tous pour conserver 450 kg avec extensions, mais qui peut affirmer qu'il décolle toujours en respect de la réglementation ? Un ''simple'' Skyranger pesant 275 kg (pauvrement équipé) + 2 hommes de 75 kg + 50 litres de carburant = 460 kg ! Autre hypocrisie, le poids des passagers : les ulmistes sont-ils tous nudistes ? J'ai pesé mes habits d'hiver : 3 à 4 kg en faisant maigre (pas de fly-jacket en cuir épais, ni de rangers montantes). Alors comment qualifier nos ULM biplaces ? Comme les cabriolets automobiles 2+2 ? Une place pour le pilote et une place de dépannage pour un adolescent anorexique ? Tout ceci est très hypocrite. Avec 500 kg, les choses sont claires : on peut réellement qualifier nos ULM de biplaces. Je préfère cela pour que mon assurance ne se désiste pas en cas d'accident. Qu'en pensez-vous ? Amicalement.
Pierre

Bien sûr, quand une norme est contraignante, le plus simple est de la changer. Cette démonstration est parfaitement étayée, mais s'appuie malheureusement sur un postulat foireux. On parle ici d'hypocrisie, mais on occulte que c'est justement ce postulat qui est hypocrite.

Qui a déclaré qu'un ULM devait ressembler à un avion ? Qui a défini le design des ULM ? Certainement pas la réglementation.

Bien au contraire. Dans sa substance et à travers ses articles, la règle définit l'ULM comme un aéronef léger, de conception simple, à la maintenance facile. Cette description me fait d'avantage penser à un chiffon volant qu'à un avion.

Reprenons les spécifications d'un Weedhopper, ou mieux d'un Quicksilver Sport 2S qui, avec une masse à vide de 195 kg, peut emporter 240 kg de fret ; voilà un ULM qui ne joue pas la carte de l'hypocrisie.

Mais bien sûr, cet appareil simple et sécuritaire n'intéresse personne. Le fait qu'il décroche à 55 km/h à pleine charge ou que sa finesse granitique lui permette d'atteindre un terrain de secours situé sous ses roues n'effleure même pas les partisans du sacro-saint parachute !

Bah non, puisqu'en ULM il faut absolument traverser la mer et survoler les forêts à 200 km/h...

L'hypocrisie n'est ni dans la règle, ni dans les ULM : elle est dans ceux qui les achètent.

On veut ''faire de l'avion'', sans en avoir les moyens financiers et sans s'emmerder avec la lourdeur administrative. Alors on biaise et on triche. Voilà où est l'hypocrisie.

Je ne partage pas le point de vue de Pierre. Parce que l'histoire (notamment celle des USA) nous enseigne que lorsque les 500 kg seront atteints, tout le monde s'accordera à clamer que c'est dangereux, hypocrite... et qu'il en faut davantage.

Or si le principe ne me dérange pas particulièrement, les faits et l'accidentologie prouvent qu'on en prendra plein la poire.

Pour ma part, je vole souvent dans les clous... aussi souvent qu'en dehors. Et je m'arrange avec mes contradictions de mec qui rêverait peut-être de voler en avion, mais qui ne vole ''qu'en'' ULM, parce que ses possibilités financières lui interdiraient théoriquement l'un et l'autre.

En fait, la bonne question à se poser est : que font les activistes de l'embonpoint dans l'aéronautique ultra légère ?

Parce qu'à cette bonne question n'existe qu'une seule bonne réponse : ils y sont parce qu'ils ne veulent ou peuvent pas aller dans une aéronautique plus coûteuse et plus complexe.

Et pour certains, parce que cette autre aéronautique ne veut plus d'eux !

Comme dit Gilou, philosophe diéséliste : quand on profite d'une grâce, il est bienséant de remercier et inspiré de se taire.


Bons vols, avec légèreté.

Miguel Horville