Aujourd'hui, dimanche 7 juin, nous fêtons nos mamans. Contrairement à une idée répandue, la fête des mères n'est pas un événement commercial moderne imaginé par d'avides discounters, mais prend ses origines loin dans le passé, dans la Grèce antique (célébrations printanières liées à la fertilité et la fécondité).

Plus récemment, au 19e siècle, célébrer les mères, les pères et plus généralement le couple et la famille devint un enjeu politique et stratégique, les nations en perpétuelles querelles nécessitant de la chair fraîche pour leurs joyeuses boucheries guerrières.

Et c'est finalement durant les deux derniers conflits mondiaux que les mother's days ont trouvé leur point d'orgue, afin de remercier les épouses et les mères du cruel sacrifice qu'elles ont enduré et les encourager à remettre le couvert pour un ultérieur festival des baïonnettes.

Mais si le concept initial joyeux a laissé place au cynisme de fous belliqueux, l'idée de consacrer un moment pour offrir de la joie à nos génitrices peut être perçue comme positive et chargée d'émotion.

Et nous autres volatiles mécanisés, pouvons célébrer nos daronnes de manière sensationnelle au sens propre comme au figuré. Vu l'âge moyen des pilotes, nos mamans, quand elles sont encore de ce monde, ne sont plus de la première fraîcheur... euphémisme.

Reste qu'une mamie, quel que soit son âge, est capable de se surpasser pour partager un moment exceptionnel avec son lardon.

C'est le cas de mam' Horville, ma vieille. En villégiature atome depuis les fantaisies de coco 1er, elle voit le Super Guépard opérer ses rotations, et aussi les potes se poser pour un café ou un coucou.

Cela semble émerveiller ma vénérable nonagénaire. Elle connaît de l'aéronautique, le Concorde à bord duquel elle a réalisé un baptême en 1992 (un local de 2000 km à Mach 2, hors registre !) et quelques traversées de France en ULM avec son rejeton.

Sauf que depuis quelques années, l'âge avance, les courbatures, les os qui pètent... bref, ce n'est plus aussi simple de se plier en huit pour monter à bord.

Mais l'envie demeure. On a beau viser le siècle d'existence, quand on a une âme pure, on rêve toujours d'être un oiseau.

Alors fiston cogite au problème et trouve des solutions. Un escabeau pour monter à bord ; une méthode pour insérer les guitares ; un coussin pour caler les reins... Au final, sans douleur et sans peine, l'ancêtre est harnachée, casquée, casquettée et UV-lunetée. Y'a plus qu'à...

D'abord préparer le sujet aux sensations. Bien sûr par météo clémente. Vérifier l'isolation phonique du casque (que les branches de lunettes ne créent pas de ''fuite''). Puis le confort d'assise et la liberté des mouvements. Bien placer le micro pour un déclenchement instinctif, quitte à régler de manière adéquate. Préparer une poche en cas de nausée.

Côté pilotage, outre les manœuvres qui sont opérées en douceur, l'émission sonore du moteur doit être gérée avec prévenance. Ce stress peut déstabiliser certaines personnes. Donc exit les aides auditives qui pourraient provoquer des sifflements et montées en régime progressives lors du point fixe.

On vérifie que la mémé a bien croisé ses mains sur les cuisses, que les pieds ne touchent pas les commandes et zou !

Un premier tour de piste pour vérifier que tout va bien en place passager, on valide le niveau de stress par le biais du regard qui doit rester mobile, attentif et ''curieux''. Si tout est ok, on peut entamer une balade en volant haut dans les couches calmes.

Avec mam' Horville, on a fait en deux temps. D'abord une courte balade d'une vingtaine de minutes pour visiter les environs, puis un aller-retour non-stop au bord de la mer, Fort Boyard, Fouras, Aix, Madame, Oléron...

Au couchant on s'en retourne vers l'Est, histoire de profiter des belles couleurs et de la pleine visibilité. Comme l'air ne cesse de nous surprendre, une petite frénésie turbulente s'empare de l'ULM. Je tente différentes méthodes pour réduire les secousses, mais rien n'y fait. Mam' s'étonne :
- c'est fou le nombre de piscines !
Rien à ajouter ; nos anciens ont le cœur bien accroché.

Atterro au plus doux et taxiage porte ouverte. A peine descendue de l'ULM, Mam' Horville attrape son GSM et raconte son expérience aux amies, une banane de quinze centimètres sous le pif !

Bonne fête, mère Mozette !

Miguel Horville