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Copyright © Patrick Perrier avec le concours de Philippe Boucherat ULM St-Exupery. Blois 2024
septembre 2024 - par ULMag - photos : Patrick Perrier - ULMag & constucteurs
Haute tenue, haute couture... Un salon perché
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visite virtuelle classée
L'édition 2024 du salon de Blois a tenu ses promesses. Une belle vitrine des plus beaux ULM, un professionnalisme affûté, des équipements de très haute technologie...
On est bien loin des rassemblements de Onzain, des haubans à cosses-coeur dont chacun cherchait le secret de la pince magique, des voiles faseillantes et des vapeurs d'huile deux-temps mêlées à celles du houblon.
Aujourd'hui, c'est carré. Démesuré, mais carré. Et si je ne souhaite tirer aucune généralité cette année, afin de ne pas tomber dans une répétition annuelle stricto sensu, j'ai l'impérieuse envie de faire partager les capsules inouïes qui m'ont le plus marqué.
Je ne doute d'aucune manière qu'elles laisseront songeurs nombre de lecteurs, comme elles m'ont moi-même laissé béat, baba, interdit, langue-pendouille et poustouflé.
A Blois, ma déambulation consiste à m'arrêter sur chaque stand afin de m'enquérir des nouveautés de l'année, des tarifs, des coloris, des projets de l'entreprise...
Je connais la plupart des exposants et reçois des informations plus ou moins avérées, après quoi je fais le tri dans les blablas, en extrait une synthèse acceptable qui servira à rédiger le compte-rendu de l'événement.
Objectivement, j'entends beaucoup moins de cracs qu'auparavant. Les ULM sensés voler à Mach 1 durant 10000 km ont déserté l'allée centrale, pour laisser place à de réelles merveilles volant à plus de 250 km/h pendant 1000 km et au-delà.
Admettez que ces chiffres sont nettement plus réalistes.
Réalistes... mais quand même étourdissants, non ?
Attendez ! Les performances ne sont rien à côté de mes morceaux choisis.
Pas de palmarès ici ; je cite les perles telles qu'elles me reviennent en mémoire.
Encore une fois, le MULM a conjuré les sortilèges météorologiques, s'octroyant un temps agréable durant toute la manifestation, sans chaleur excessive en raison de la date exceptionnellement tardive.
Devant un biplace côte-à-côte haut de gamme semi-performant :
- Quels équipements sont inclus dans le tarif ?
- Basique, du Kanardia pour le tableau de bord, les roues Beringer, le parachute, la sellerie luxe sont de série.
- Si le client désire un écran multifonction ?
- Comptez 40 000 euros de plus (quarante mille).
- Quoi !?!
- Oui, un Garmin G3X 10in coûte cher, presque 6000 euros , ajoutons les sondes, la pose, on met une radio adaptée, le transpondeur...
- D'accord, mais ça fait pas un peu cher le bouquet de sondes, ça ? D'autant qu'on doit déduire le prix des instruments Kanardia qui sont assez nombreux d'origine (environ 7000 euros)...
- Ils sont déduits. Mais si le client souhaite un deuxième EFIS, celui-ci coûtera beaucoup moins cher, presque la moitié du premier...
Nous voilà rassurés !
Entre deux EFIS Garmin G3X Touch 10in, un petit GPS Garmin GTN 750XI 7in surplombant l'autopilote GFC 500 et le gestionnaire audio GMA, à gauche un EFIS Garmin G5 certifié... Bref un tableau de bord qui vaut le prix d'une belle petite maison à la campagne et qui pèse au bas mot 20 litres d'autonomie carburant !
Devant un monoplace ouvert, copie du légendaire Sirocco d'Aviasud, à moteur de paramoteur :
- What price for this microlight ?
Bon, là faut expliquer que le zoziau est vendu par des schpountz qui causent anglais aussi mal que moi ; donc on se perd un peu dans les chiffres, jusqu'au moment où un casque à pointe me tend le tarif imprimé ; et là...
- Siouplaît pardon skusez-moi... Z'êtes bien sûr de la monnaie ? On causerait pas plutôt en dirhams, par hasard ?
- No, no... it's correct !
Donc le zinzin, certes le plus luxueusement full options, avec peinture à thème (signature Edition Patrice Franceschi), radio, bidule et machin, écran plus large que le cockpit... est vendu 135 000 euros ttc (cent trente-cinq mille) !
Souhaitez-vous des garde-boue pour gagner 5 km/h ?
On vous fait ça pour 2 160 euros...
Une motorisation électrique ?
Possible, comme à la SENECEFE ; ajoutez dix mille balles !
Une remorque ?
Warum nicht ; 16 300 piastres...
Je le revends combien quand j'en suis lassé ?
Rien du tout... les monoplaces ne se revendent pas !
Le Sirocco d'Aviasud, conçu en 1981 par François Goethals et Bernard d'Otreppe ; ULM performant et économique... à l'époque.
Devant un biplace haut de gamme performant :
- En résumé l'ULM n'a que très peu changé en 2024 : quelques détails de finition, un vide-poche redessiné... Pourtant le tarif augmente de presque 20%, passant de 270 kE à 320 kE. Qu'est-ce qui explique cette augmentation ?
- Les moteurs ont augmenté, ainsi que les instrumentations et même la matière première, le carbone pré-imprégné est devenu très cher...
L'argumentation est factuellement correcte.
Mais ne justifie aucunement 20% de hausse. Primo parce qu'aucun des matériels cités n'a augmenté de 20%. Deuxio parce que le matériel ne représente qu'une part mineure du coût d'un ULM dans ces gammes de tarifs. Ramené en chiffres, le moteur aurait pris 3000 euros (pas du tout il n'a pris qu'en moyenne 2% entre 2023 et 2024, mais c'est pour illustrer) ; le carbone 2500 euros (faux, il a pris beaucoup moins) ; les instruments 2500 euros (là encore chiffre gonflé) ; l'accastillage 1500 euros...
Donc à la grosse avec une exagération XXL, l'augmentation du coût de fabrication est de l'ordre de dix mille euros quand l'ULM a gonflé de 50 000 euros !
Le salaire des employés peut-être ? Hahahaha la bonne blague ! Si les salaires augmentaient de la sorte, l'Europe serait devenue la Californie !
Pour des modifications techniques mineures, sur un autre stand, un multiaxe métallique à ailes basses de milieu de gamme a pris +74,5% en version de base sans parachute et +49% en version normalement équipée (VHF-TX, parachute, carénages de roues...). Il passe ainsi d'ULM peu coûteux à ULM normalement cher comme les autres.
Reporter l'augmentation annuelle à deux chiffres des tarifs des ULM haut de gamme sur les matériels et matériaux de construction est une imposture : les moteurs Rotax souvent visés n'ont pris en moyenne qu'entre 2 et 4% durant l'exercice 2023-2024 ; les fibres carbone pré-imprégnée ont connu une hausse comprise entre 2 et 8,4% durant cette même période... © illustration prototypage Oratech.
Avec un importateur d'ULM très très très rapides :
- Alberto repart déjà ?
- Oui, il est juste venu dire bonjour et visiter le stand. Maintenant il rentre à Milan, il y sera dans moins de deux heures...
L'option navette spatiale n'étant pas disponible à cet instant, Alberto a effectivement couvert les 660 km et franchi les Alpes en ULM et en 105 minutes !
ULM ou fusée ?
Devant un magnifique ULM tandem turbiné :
- Quelles versions seront importées ?
- Pour l'instant seulement la version avec turbine qui bénéficie de la nouvelle réglementation 600 kg, car avec le Rotax 912 il est trop lourd pour notre réglementation 525 kg.
- Quel sera le tarif ?
- Nous allons essayer de rester sous la barre des 500 000 euros (cinq cent mille)...
- Ah ouais, quand même...
- Oui, mais... TTC...
Ben alors ça va !
Illustration © Disney
Avec un vendeur d'ULM très haut de gamme :
- Mais qui achète des ULM à trois ou quatre cent mille euros ?
- Souvent des chefs d'entreprise qui les prennent en société.
- Des instructeurs, des loueurs ?
- Non, des médecins, industriels, patrons de PME... Après, ce qu'ils en font ne me regarde pas.
Pour faire simple, on est face à de l'abus de bien social pur jus, ou à du blanchiment. Sans porter de jugement de valeur, on comprend mieux certaines transactions.
Illustration imaginaire générée par IA © Canva.
Avec un autre vendeur d'ULM haut de gamme :
- Je vois beaucoup ''d'ULM'' avec des Rotax 915 iS ou 916 iS. Je ne comprends pas bien leur présence ici, puisqu'ils ne sont pas réglementaires en France.
- Il s'agit d'appareils étrangers venus pour le salon...
- OK, mais j'ai discuté avec un proprio, il parlait très bien français, sans accent ?
- Certains sont immatriculés dans d'autres pays d'Europe et volent en France comme ça...
- C'est extrêmement réglementé et restrictif, cette façon de faire ?
- Mouais... encore faut-il prouver que le pilote vole régulièrement en France... c'est pas facile. Et tant qu'il n'y a pas de problème, personne ne s'en occupe.
- Mais en cas d'accident, les enquêteurs sauront bien quelles sont les habitudes du pilote ?
- En cas d'accident, le pilote n'aura plus beaucoup de soucis...
Vu comme ça, en effet, pourquoi se priver.
Le 915 iS est en voie de ringardisation auprès de la classe 3... Les constructeurs européens lui préfèrent le 916 iS et ses 160 ch.
Devant un dispositif d'injection de haute technicité :
- Imaginons que je dépose mon ULM à Rotax 912S dans ton atelier pour procéder au remplacement des carburateurs par une injection simple. Combien devrais-je débourser ?
- 20 400 euros ttc.
- Et pour une injection double (2 injecteurs par cylindre) ?
- 26 400 euros.
Bien bien bien...
Juste pour mémoire, un Rotax 912 iS en caisse coûte 27 600 euros ttc.
Rotax 912 iS : 27 600 euros ttc (sept. 2024).
Drôle de salon, non ?
Pour autant, cet étalage de blé, cette course au luxe démesurée ne m'ont pas gêné cette année. Je ne suis pas venu à Blois dans l'intention de comparer mes possibilités financières aux offres qui sont exposées.
J'ai décidé que tout ceci est une vitrine, comme celles qu'on lèche dans les beaux quartiers. Des endroits que les individus normaux ont juste le droit de frôler, pas de toucher.
Toutefois, je suis également affligé.
Théoriquement comptable de la promotion populaire de notre discipline, notre fédération a clairement choisi de tisser des liens étroits avec les entités élitistes qui l'entraînent sur un chemin scabreux dont elle ne possède pas les codes.
Quelques décennies en arrière, il y avait l'aviation certifiée dont le siège fédéral établi dans un riche quartier de Paris ne laissait planer aucun doute quant à son positionnement social.
A cette époque, la grande messe annuelle de l'ULM se déroulait au bord d'un camping lédocarien.
Voyant la FFA se déliter, ses avions tomber en ruine, ses clubs s'évaporer au rythme des visites médicales rejetées, la FFPLUM a flairé la récupération facile pour gonfler son troupeau et ''peser'' face à l'autorité de tutelle (poids imaginaire ; elle n'est même pas un caillou dans la chaussure de l'autorité).
Ce faisant, elle a multiplié les signes d'allégeance, acceptant l'antithèse de notre ADN, reniant ses propres statuts et jusqu'à sa définition première (appareil simple pouvant être entretenu... blablabla...). Classe 6, injection, turbine, auto pilote, trains rentrant... C'est tout l'inverse. Mais c'est l'ordinaire d'aujourd'hui.
Alors bien sûr les chiffres ont suivi la débauche technologique. Au point que Blois n'est plus le rassemblement des ULM, mais celui de beaux et riches avions rapides.
J'aurais pu partir de Blois déconcerté, confus...
Puis j'ai passé une soirée de fiesta au village paramoteur, et là... Des jeunes partout ! Même les viocs sont jeunes, au pays des méduses. Des fauchés, beaucoup de fauchés. Je me sens chez moi dans cette confusion arrosée. Je comprends tout de cette population accessible qui vole pour quelques milliers d'euros et jouit à 5 mètres du sol.
Dimanche matin, j'avais un manche de pioche au travers du front, la faute à une fontaine magique qui distribue de l'eau de source frelatée. Mais tout embrumé que j'étais, j'avais une putain de banane, un pêche de tous les diables.
Alors j'ai causé avec Didier Marie, Henri Mignet du XXIe siècle... Faire voler un multiaxe à moins de dix mille euros, bien sûr que c'est possible ! C'est pour ça que je développe le Piaf...
Puis j'ai causé avec Daniel Dalby, inventeur des échelles volantes (Scoutchel, Demoichelle, Pouchel, Cubchel...).
APEV Cubchel, ou comment voler en multiaxe pour moins de 10 000 euros.
C'est là que j'ai compris une chose.
Les acteurs du luxe et la fédé' m'expliquent que la montée en gamme n'est pas nocive et n'enlève rien à l'esprit ULM, ce que je sais inexorablement faux et l'avenir le prouvera...
Les acteurs de l'ULM rétro (respectés et bien représentés au salon, je dois le reconnaître) visent une rationalité populaire accessible et fidèle au concept initial...
Les paramotoristes n'ont que faire de machins rigides volant à plus de 40 km/h...
J'ai compris que des gens qui ne parlent pas la même langue ne sont pas réellement liés.
Du coup je m'interroge sur la nécessité de faire crécher sous le même toit des gens aux visions et aux conceptions aussi différentes.
Je ne fais que poser le propos...
La fontaine magique du village des irréductibles paramotoristes... Elle rafraîchit au début, elle réchauffe ensuite... Ce n'est qu'au matin qu'on sent pousser un manche de pioche au travers du front !
L'équipe de France de paramoteur réalise toujours des exhibitions de grande qualité. L'édition 2024 n'échappe pas à la règle.
MULM de Blois, prétexte à la clôture du championnat STOL français avec un Eric Grare en pleine forme (sur proto Yuma) qui a terminé vainqueur avec 28,4 mètres (décollage + atterrissage).
Unique pendulaire à participer à l'Open STOL 2024, Michel Durand a totalisé 58 mètres avec son Cosmos Top 12.
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