Cet essai n'est pas comme les autres. J'ai volé presque 600 km, par une météo de novembre des plus incertaine, pour assouvir une envie, une pulsion. L'objet de ma convoitise semble remplir le manque que je ressens ; pour cela j'aurais rampé des heures à poil sur du verre pilé. Le compulsif ne se contrôle pas ; le parfait cartésien calculateur peut craquer.
Je me suis donc rendu à l'autre bout de l'univers, à Fournet-Blancheroche, aux confins de la frontière Suisse. Un endroit particulièrement accueillant et vivant, avec dortoirs, cuisine, commodités et une ambiance club familiale où manger bon et gras est une préoccupation prioritaire. Je me suis propulsé sur cette bande herbeuse perchée à 2880 ft dans les alpages, dans l'optique d'acquérir cet ULM minimaliste.
La raison ? Une part importante de mes vols se résume à virevolter sans but autour de chez moi (j'ai la chance de posséder ma piste perso devant ma maison). Souvent, je brûle 7 à 8 minutes de jus pour chauffer le 912 S, ceci pour m'élever à 1800 ft avant de couper le moteur et me laisser glisser jusque chez Terry, un voisin pilote qui m'offre un café imbuvable ou un thé anglais discutable. Cramer autant d'énergie et soulever 450 kg d'alu pour d'aussi maigres nécessités, s'apparente à du gâchis. Or je n'aime pas le gâchis. Alors je me suis taillé un cahier des charges pile-poil et ai décidé que la bestiole qui cochera toutes les cases sera ma prochaine monture :
- volant très souvent en solo, un monoplace me suffira,
- appréciant les pistes merdiques, enclavées et courtes, l'objet devra se poser et décoller court, avec de bonnes capacités d'absorption des inégalités,
- la vitesse de croisière m'indiffère,
- le design m'indiffère,
- la motorisation m'indiffère, à condition de ne pas être un gouffre à coco,
- si l'engin peut supporter quelques manipulations inusuelles, ce n'en sera que mieux...
Les surprises restent à découvrir, toutes ces choses auxquelles on ne pense pas avant d'essayer.
Le vendeur est très sympa. Il accepte de me laisser piloter sa machine sans garantie que je l'achète ; c'est seulement après le test que nous saurons si oui ou non le Minifox changera de mains.
Car outre l'envie, il n'est pas question de rater cette assez bonne affaire si elle me convient. C'est pourquoi j'ai entamé ce vol ''compliqué'' (mais de seulement 4 heures, au lieu de 9 en bagnole et 17 en train-car). Bref j'ai les yeux brillants, l'effervescence à fleur de peau, et mon compte est approvisionné.
L'ULM que j'essaye est un peu plus que le Minifox de base : il s'agit de la version carénée nommée EvoSpeed. Dans le cas précis, le propriétaire a construit sa machine depuis un kit et l'a ensuite agrémentée de ce cockpit optionnel intégral et de luxueux équipements. La construction est très soignée et l'appareil qui totalise une vingtaine d'heures est dans un état exceptionnel.