Le 2 août 2019, le journal officiel a publié l'arrêté du 12 juillet relatif aux procédures générales de circulation aérienne pour l'utilisation des aérodromes par les aéronefs.
Ce texte est signé de Marc Borel, directeur du transport aérien à la direction générale de l'aviation civile (DGAC), par délégation pour la ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, Elisabeth Borne.
L'entrée en vigueur de l'arrêté est fixée au 2 septembre 2019.
Que dit cet arrêté ?
Rien de bien extraordinaire qu'on ne sache déjà concernant les circuits d'aérodromes. Un précis de ce que tout pilote fait, ou doit faire, ou devrait savoir faire.
Cela sert
au moins à justifier le salaire des potes de promo. Ils sont fiers de montrer ''leur loi'' à maman et s'en vont indiquer à bobonne c'est qui le pacha à la casbah !
Bref du blabla, jusqu'à la partie F spécifique aux aéronefs ultralégers motorisés (ULM) et aux planeurs ultralégers (PUL) qui ne manquera pas d'intéresser les glands d'ulmistes.
Il est écrit que :
l'utilisation par les ULM de classe 2, 3 et 4 et 6 des aérodromes pour lesquels des procédures de départ ou d'approche aux instruments sont publiées (NDR : percées IFR signalées par des p'tits points sur les cartes OACI), est subordonnée à la justification par le pilote de son aptitude à s'intégrer dans la circulation d'aérodrome de ces aérodromes :
- soit par une attestation délivrée par un instructeur de pilote d'ULM selon un programme de formation intégrant cette aptitude particulière ;
- soit par la détention d'une qualification de radiotéléphonie au titre d'une licence de pilotage valide pour toute autre catégorie d'aéronef ;
- soit par la preuve d'une pratique dans le cadre d'un accord de l'autorité compétente des services de la circulation aérienne précédemment délivré.
A ce stade de la lecture, on pense à un énième défonçage de porte ouverte : pour causer dans le poste, les pilotes ULM doivent détenir la qualification radio. Comme les aérodromes ci-dessus décrits imposent une procédure radio, cela semble tomber sous le sens...
Raté ! Ce n'est pas ce qu'il faut comprendre. Parce que si tel était le cas, l'article Partie F de l'arrêté n'aurait pas lieu d'être. Or il est.
Non. Il faut comprendre que la qualification radio, délivrée aux ulmistes (par délégation) par l'autorité régissant l'aviation civile, a autant de valeur qu'une pastille de menthe n'en a contre un cancer colorectal.
Bref, on peut se torcher avec !
Ce faisant, l'autorité en question reconnaît qu'elle distribue les brevets ou les qualifications n'importe comment ; donc qu'elle est incompétente à gérer des machins qui volent. C'est pas un scoop.
Qu'on se comprenne. Je n'ai jamais affirmé que tous les ulmistes qualifiés radio possèdent un bon niveau de phraséo'. De même j'affirme que de nombreux ''autres nobles'' pilotes sont des tanches en blablatage hertzien. Et bibi épisodiquement itou. Admettons ce postulat.
Mais dans ce cas, fallait pas distribuer les qualif' comme les bons points à l'école des fans. On n'a pas demandé des pochettes surprises de tirette à deux-balles.
Convenons qu'une génération de pilotes s'est vue remettre la qualif' radio au bar de l'escadrille en échange d'une roteuse. Et alors ?
Qui a eu l'idée géniale de valider le tamponnage bidon ? N'est-ce pas l'autorité concernée et sa cohorte fantoche ?
Et puis : qui va vérifier que la qualif' Premium sera remise aux demandeurs avec le sérieux attendu ?
Qui va vérifier que l'instructeur-tamponneur aura le niveau requis pour délivrer le sésame ?
Qui va contrôler que la délivrance sera faite en vol et non au club-house ?
Tous les instructeurs ont-ils déjà pratiqué des aérodromes contrôlés, ceux avec percée IFR ?
Tout cela relève de la fumisterie ; de l'emporte-pièce ; de l'amateurisme ; du n'importe-quoi. Un truc d'ingénieurs des grandes écoles... Ces mecs qui brassent les décisions avec, comme expérience de terrain, la projection d'un PowerPoint sur un tableau d'amphi poussiéreux.
Ainsi, le vélivole qui ne pratique que dans son champ ; le BB qualifié sous De Gaulle ; ces pilotes sont aptes à trafiquer là où des ulmistes aguerris sont mis en doute...
C'est juste complètement con.
Con et injuste.
Mais attendez le meilleur...
En préambule, j'ai mentionné la date d'entrée en vigueur de l'arrêté. Cette date : quelle est-elle ?
Le 2 septembre 2019.
Bravo à ceux qui suivent.
Mais dites... Où est l'arrêté qui décrit le
programme de formation intégrant cette aptitude particulière ?
PAS ENCORE ÉCRIT !
C'est ballot, vous en conviendrez...
Donc si on applique la loi à la lettre, le pilote ULM qui se rend ordinairement sur un terrain concerné, ne peut plus s'y rendre depuis 2 mois. Pour s'y rendre, il doit passer un permis qui n'existe pas.
Bon... celui-là n'a qu'à aller voir chez mémé si l'herbe y est plus verte.
Mais le basé ; comment fait-il ?
Il doit apporter
la preuve d'une pratique dans le cadre d'un accord de l'autorité compétente des services de la circulation aérienne précédemment délivré.
La bonne blague ! La preuve qu'il est nul en radio, ou la preuve qu'il n'existe pas plus de programme de dé-nullisation que d'échelle d'évaluation de nullité ?
En fait, la seule question pertinente est :
''le technocrate inspiré (Marc Borel et/ou son orchestre ?) qui a pondu cet arrêté a-t-il lui-même obtenu la qualif' permettant de piloter un mandat de délégation''.
Si j'en crois mes antennes, il semble que sa proche subordination a fait des bonds en découvrant l'absurdité du texte.
Encore un que l'histoire n'aura pas à oublier... quelques secondes y suffiront.
Donc pour faire simple, les pilotes d'ULM sont des glands dont les droits sont comme des briquets ou les mouchoirs : jetables (briquet + mouchoir... le bon cocktail de Viatcheslav Molotov). Or si le concept n'est pas franchement révolutionnaire, il fallait quand même un certain aplomb pour le notifier dans un texte de loi et, ce faisant, reconnaître qu'on avait homologué les glands, donc qu'on était soi-même le roi des glands.
Contacté à ce sujet, la FFPLUM insiste sur le fait que cet arrêté est une chance pour nous !
Grâce à cet arrêté, les aérodromes n'auront plus la possibilité de refuser l'accès aux ULM, car ils devront s'en justifier ; et si la justification n'est pas pertinente, elle leur sera refusée.
Désolé, mais cette analyse n'est étayée par aucun écrit, par rien. Elle est hors du champ de l'arrêté qui ne l'évoque d'aucune manière. Bref aucun rapport.
Bien au contraire ; l'arrêté précise dans la partie F (la partie réservée aux ULM) que
lorsque les conditions de circulation aérienne sur l'aérodrome ou dans l'espace aérien environnant le justifient, cette utilisation (comprenez par les ULM)
peut être interdite ou restreinte par la direction de la sécurité de l'aviation civile territorialement compétente. Ces interdictions et restrictions sont portées à la connaissance des usagers par la voie de l'information aéronautique.
Cela ne peut être traduit que d'une manière : désormais l'information aéronautique pourra distinguer les ULM des autres aéronefs. Il faut être bien crédule pour imaginer un rétropédalage des gestionnaires d'aérodromes à l'endroit des ULM.
Pire que le statuquo actuel, on pourra découvrir à l'avenir des NOTAM ou des SUP-AIP ciblant exclusivement les ULM !
Donc ''demain on ne rasera pas gratis'' ; ça c'est garanti !
Pour quelle raison la FFPLUM défend-elle cet inacceptable arrêté qui présente les ulmistes comme des glands ?
Est-ce une manière de défendre ses adhérents ?
Est-ce une méthode pour les faire respecter ?
Est-ce une façon de défendre la valeur de nos brevets et qualifications ?
Car si aujourd'hui la FFPLUM passe sur ce mépris, alors demain elle concèdera peut-être que nos brevets de pilotage ne valent pas mieux que cette qualif' paillasson.
L'autorité aura alors beau jeu de nous soustraire des morceaux de ciel au motif que notre niveau ne nous permet pas d'y prétendre.
J'ai toujours entretenu une certaine méfiance vis-à-vis de l'autorité dont nous dépendons. La DGAC dépend d'un ministère. Le ministère est dirigé par un ou une ministre formaté pour la rentabilité, le renvoi d'ascenseur, le risque zéro, le léchage de CUC40, les enjeux électoraux, son premier et son suprême...
Ils se tapent de nos petits problèmes d'ulmistes comme de leur premier mensonge. Ils n'y entendent rien et entendent ne jamais rien n'y entendre. Eux volent en Falcon payé par la taxe carbone.
Comment imaginer une seule seconde que les revendications de zozos ailés puissent intéresser des personnes qui ont promis le ciel aux compagnies aériennes, aux drones de la défense, aux p'tits copains et à l'EASA ?
Que la DGAC ait ou non co-rédigé l'arrêté de juillet ; qu'elle ait été évincée par le ministère, comme le suggère la FFPLUM, cela revient au même : elle ne roule pas pour nous.
Croire au donnant-donnant, comme semble le faire la FFPLUM, relève de la plus profonde naïveté. D'abord parce que la fédé' n'a rien à troquer. Ensuite parce que ce principe implique une réciprocité entre les parties. Qui peut en déceler une ébauche entre un très sérieux ministère et une bande de joyeux crétins qui se suspendent dans le vide pour faire marrer les galinettes ?
Faut arrêter deux secondes de prendre ses rêves pour des réalités Et retomber sur Terre. Seul un bras de fer musclé et solidement étayé peut répondre aux errements technocratiques que nous subissons.
La première marque de résignation signe notre consentement à tout et au reste.
Perso', je pense que nous sommes très mal barrés. Nos intérêts sont tellement minuscules et autocentrés face à une implacable logique politique et sociétale... Nous avions une belle opportunité, avec l'ULM, de vivre notre plaisir discrètement, profitant d'une réglementation légère.
Mais cela n'a pas suffit. Il a fallu intégrer des engins hautement sophistiqués, augmenter les masses, les puissances, revendiquer des droits...
Maintenant commence le décompte de nos libertés perdues pour avoir voulu toujours un peu plus, jusqu'à un peu trop.
Aujourd'hui la qualif' radio est remise en cause ; et demain ?
Comme dit Gilou, philosophe-diéséliste et psycho-chaudronnier :
''on peut briller, puis s'éteindre ; on peut s'élever, puis retomber ; la transparence permet juste de durer'' (mais il dit aussi beaucoup de conneries).
voir l'arrêté du 12 juillet 2019
Bons vols, en légèreté et en souplesse.
Miguel Horville