Histoire d'un rêve qui se termine
Pourquoi nomme-t-on cauchemar un mauvais rêve, alors qu'il n'existe aucun substantif pour désigner un rêve agréable ?
Plusieurs semaines sont passées depuis le début du confinement sanitaire. Un emprisonnement qui sape les repères et change les gens.
Alors certains s'occupent à des trucs marrants, tournent des vidéos amusantes qu'ils partagent sur les réseaux, comme le défi FFPLUM.
Les pilotes trépignent dans l'attente de voler. Y'en a même un qui s'est réellement envolé, sans matériel, sans rien que son rêve, dans la 2e semaine du défi susmentionné. Cool...
D'autres, comme bibi, s'acharnent. Marre d'apercevoir la dérive du Super Guépard sous un ciel bleu profond par la fenêtre de mon bureau. Dépité, je plonge tête première dans mes écrans et programme des machins hyper chiants pour améliorer votre magazine.
Et parfois, des trucs surviennent... Comme la semaine passée.
Après une nuit précédente trop courte et un paquet d'heures à coder, maussade devant cette météo tentatrice, je m'abandonne un moment à la rêverie... puis à la sieste, le front sur les pouces, en surplomb du clavier.
J'imagine que Jerry Thompson adoptait cette posture lorsqu'il songeait au bouton de rose de Charles Foster Kane. Je le vois, sur sa Remington bakélite, puant le tabac froid, dans la pâleur jaunâtre d'une Cooper Hewitt à vapeur de mercure.
Puis Jerry s'estompe. Une brume légère envahit la plaine dans le couchant. Les ombres d'éoliennes dévorent des kilomètres de champs et avalent les hameaux de Beauce. Le moteur tourne rond, tellement lentement, en silence.
Je décide d'atterrir sur une piste étrange tapissée de gaufrettes qu'un contrôleur ironique me prie de ne pas écraser... J'entame avec lui un débat sur l'art subversif, qu'il poursuit sur la subversivité étendue aux opinions et à l'humour.
J'ai lu des trucs sur le sujet. Certains subversifs jugent l'autorité avec sévérité. Ils propagent ça et là des choses terribles, des trames complotistes, de la malveillance, de l'enrichissement, des crimes...
En fait, les subversifs ne m'inspirent pas. Ils me dépriment. Perso, je suis objectif, ce qui ne rend pas forcément plus joyeux, d'ailleurs.
Courte finale... Je procède au mieux sans toutefois sauver les biscuits, et me retrouve vautré dans le canapé, devant la télé. Nous sommes en mai 2017. Il caille un brin. Au poste, le chef de l'état fraîchement démoulé explique que le peuple peut avoir confiance en lui et en son gouvernement.
J'enregistre l'info mais reste objectif : wait and see...
La séquence semble s'emballer, de plus en plus vite. J'aperçois des images nombreuses, colorées, des milliers, des éclats, de la lumière, des personnes, des objets, du jaune, du bleu, du rouge, du noir, une avalanche d'informations qui me fait perdre pied. Le sol s'ouvre et le canapé chute dans le néant. Je n'ai pas peur, ni mal, ne perçois aucune sensation, pas même le mouvement de l'air.
Je cligne les paupières et retrouve une position usuelle, la même qu'avant la chute, en fait... Même endroit, mais des petites choses ont changé. Des détails. Un journal sur la table basse, que je ne connais pas. Une odeur légère, comme annonciatrice de printemps. Et la téloche diffuse.
Nous sommes en 2020 et le chef d'état déclare la guerre à un ennemi invisible.
Quand le taulier dit qu'on est en guerre, il n'est pas subversif de comprendre, qu'on est en guerre.
C'est même parfaitement objectif.
Le film accélère de nouveau, mais cette fois sans chute, sans fureur... Juste un bref saut dans le futur.
Je contemple une mégapole déserte depuis la terrasse d'un building. Quelques rares véhicules glissent sur les chaussées luisantes. Une sirène se déplace au loin, dans le silence immatériel de cette ville vidée de son humanité.
Le ciel est pur : pas un nuage, pas un avion, pas un oiseau, pas de vent, pas d'odeur, pas une vie.
Je tiens un journal. Bizarre ; je déteste le contact du papier mat de presse. A la UNE, il est écrit sur 5 colonnes que le président Macron (celui qui mandait la confiance) et son gouvernement nous mentent et nous trahissent. Pas une sémantique bancale : une histoire de masques, prouvée, démontrée, avouée : en un mot objective !
Derrière moi j'entends des cliquetis...
Ce son résonne comme une évidence : en temps de guerre, un homme qui ment et qui trahit le peuple reçoit 12 balles en solde de tout compte. Je tiens le journal bien haut pour que le peloton reprenne la typo.
Détonations, fumée... La feuille de presse est recomposée. J'y lis que le président est présentement décédé et le restera, a priori, définitivement. L'autorité qui, dans son ensemble, a suivi en ordre d'en marche le traitre-menteur ramasse également le plomb qui lui est dû.
C'est juste une information, qui ne me rend ni joyeux, ni triste, pas inquiet non plus. Je dois seulement réfléchir à la situation et descendre de ce gratte-ciel pour retrouver ma vie sans doute très éloignée de ce paysage urbain post-normal.
La descente est effarante à travers un labyrinthe tridimensionnel, mêlant pentes, escaliers, ascenseurs et couloirs. Je cours pour échapper au bâtiment qui semble sans fin. Le journal m'échappe. Quand je le ramasse, la UNE s'efface remplacée par ces trois seuls mots en gros caractères : Ton destin est...
Je suis dehors maintenant. Plus de ville, plus de béton. Je suis près du hangar, assis sur un tas de bûches. J'ai perdu le journal. Seulement retenu le message.
Des grailles tournoient entre les arbres, pour la reproduction. Leur croassement réveille la campagne silencieuse. Ma chienne traque un mulot. Nul moteur ne trouble l'instant.
Je dois décider ce qu'est mon destin. Mieux, je dois dessiner mon destin.
Débarrassé de salopards vendus à un ennemi invisible, je dois rétablir le fil d'une histoire biaisée. Les menteurs ayant menti, je pense que leurs décisions étaient contraires à l'intérêt commun, du moins au mien.
Donc l'emprisonnement collectif est injustifié. Dès lors, je déchire l'ausweiss et piétine toutes les interdictions imaginées depuis mars pour me ''sauver la vie''.
Comme je ne suis pas idiot, je me protège le groin et sort mon cher aéronef confiné de sa torpeur.
Et je vole, vole... Jusqu'à croiser la route d'un hélico bleu qui me ramène autoritairement au sol.
Les képis péremptoires me rançonnent.
- Mais enfin, m'sieur l'argent ; vous ne lisez pas les journaux ? Le château s'est écroulé. Les interdits ont sauté !
- Veux pas l'savoir... On m'a dit de verbaliser, je verbalise...
- On vous a également ordonné de retirer votre masque, vous mettant en péril ! Votre hiérarchie s'est moquée de vous... Cela ne vous interpelle pas ?
- Signez-là. Si vous ne payez pas dans le délai l'amende sera majorée. Votre aéronef est immobilisé. Vous serez convoqué au tribunal...
- C'est pas possible ça ; j'ai l'impression de vivre un cauchemar !
Quel mot pourrait qualifier un rêve qui commence agréablement et qui se termine mal ?
La vie...
Comme dit Gilou, philosophe-diéséliste et psycho-chaudronnier : déconfit ne ment que lorsque des cons finement abusés l'écoutent.
Bon emprisonnement, faites de beaux rêves... ceux qui disent savoir veillent sur nous.
Miguel Horville
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Parler patois pas parler à toi ?
En France, on parle français. En Australie on parle anglais, en Autriche ou à Pékin on parle aux p'tits chiens, à Canton on parle riz, sur Mars martien et au Chili con carné.
Mais surtout, en France on parle français, parfois patois, mais plus souvent pas. Je me fous pas mal qu'on parle indonésien au Liban...
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